Quelques extraits tirés de mon recueil ....
Les
lumières du bar la rassurent..Ambiance feutrée… Les fauteuils
ont l'air moelleux, décoration zen. Un lieu comme il en existe tant
d'autres , mais parfaitement adapté aux circonstances. Ni trop
intime, ni trop solennel… Elle doit se fondre dans ce décor...Son
cœur bat la chamade, elle ne sait plus pourquoi elle a accepté de
venir, ou plutôt non elle ne le sait que trop . Impossible
maintenant de reculer , c'est une page de son histoire qu'elle
s'apprête à écrire et non des moindres.
Il
est 19h30, elle a le temps.. Elle hésite… Choisir une des tables
au fond de la pièce ou au contraire rester près du comptoir.. Voir
ou être vue ? Peu importe , son heure est venue mais elle la
voudrait adoucie. Une transition voulue
qui se déroule avec élégance….. Ce sera dans l'angle à
gauche..
C'est
absurde de penser à l'élégance à cet instant précis, se dit elle
..Quelle idiote je suis… Élégance du ridicule..Elle se sent comme
une parachutiste, qui juste avant son premier saut, se soucierait
plus de son brushing que du danger..
19h50 …
le temps s'écoule autrement ici. 20 minutes dans son couloir de vie
qu'elles a égrainées bien plus facilement qu'elle ne l'aurait cru.
Elle a soif.. Est- il convenable de déranger le barman pour si peu
? Elle peut attendre et puis ce petit picotement dans sa gorge
n'a probablement rien à voir avec la soif…
Machinalement,
elle tourne dans ses mains, le photophore posé sur la table. Elle
n'y avait pas prêté vraiment attention, juste remarqué que la
bougie est verte.. Verte comme l'espoir, sourit elle.. C'est un signe
de plus s'il en fallait un…
Il n'a plus ni
passé, ni présent.Caillou échoué sur une plage inconnue, il erre
dans sa mémoire, à la recherche d'une histoire qui n'existe déjà
plus.Un autre monde, un autre décor, froid, hostile de silence,
aucun écho qui le relie à une partie de lui même.
Il se sent feuille
tombée de l'arbre et que le vent ballotte au gré de ses envies,
feuille parmi des milliers de feuilles, tapis piétiné, foulé par
des pas indifférents. Il sont des milliers comme lui à avoir
entrepris ce voyage de la désespérance, dans l’espoir d'une autre
chance. Chance de quoi? De se dépouiller plus encore… de
transporter leur âme vers un eldorado imaginé.
Ses pieds foulent un
sol inconnu, rien ne lui est familier, les paysages, les odeurs, les
êtres mêmes lui semblent étrangement figés. Ses sons aussi qu'il
ne comprend pas. Il se sent en transit de son propre destin.
Il s'est tant battu
pour partir, a enduré des humiliations, des souffrances que personne
n'entend, n'envisage même. Il est un fragment de la mosaïque
interminable des réfugiés, petit morceau de l'humanité qui dérive,
se dilue dans la déferlante de l'exil.
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